Carnet de Nice (fin) - Vers Santo Sospir

Publié le par alf

Bien calé sur mon siège, j’observe le bleu azur, les palmiers et les rochers qui défilent, les villas luxueuses que l’on devine - le château de l’anglais, la villa Rotschild... - et soudain me revient en mémoire Cocteau en ombre chinoise, dans un film, réalisé dans les années 50. Un film tourné dans ce lieu enchanteur aux couleurs chatoyantes, aux parfums de mystère et d’insolite.

A Villefranche-sur-Mer, le visage du poète taillé dans la pierre trône juste à côté du port. Il y a aussi la chapelle des pêcheurs, qu’il décora en 1957. Fermée, même si l’horaire placardé l’annonce ouverte. Ses trésors resteront secrets.

Je me souviens du film. Un moyen-métrage expérimental réalisé par Cocteau même. J’ai encore une vieille VHS sur laquelle je l’ai enregistré et que je conserve comme une perle que je vais repêcher de temps à autre.

Je cherche sans trop chercher cette villa du bord de mer, entièrement décorée par le touche-à-tout lunaire… Ce film hante mon séjour. On me dira que « oui, c’est à St-Jean… »; que « non, elle n’est pas visitable ». Tant mieux finalement.

Au retour, je repêche la K7, revisionne le petit film: « La Villa Santo Sospir », 1950. Assistant: Frédéric Rossif. Musique: Vivaldi & Bach. Procédé: Kodachrome. « Nous sommes en face de la machine qui invente » dit la voix en parlant de ces couleurs excessives, irréelles.

Un arroseur filmé au ralenti, des images passées à l’envers… Procédés au charme désuet, sans doute modernes en 1950. Jean Cocteau s’amuse: «  un jour, les artistes chercheront à provoquer exprès les accidents que nous apportent le hasard ».

 

Ombre et lumière. L’artiste protéïforme insiste pour nous faire la visite et ne nous épargnera aucune pièce! Bavard, trop bavard comme toujours. Mais n’est-ce pas ce qui fait son charme, aussi? Toute la mythologie défile sous le pinceau de l’amoureux des lignes épurées: Narcisse, Ulysse, les sirènes… Orphée, bien sûr. Puis le soleil, la lune, les pêcheurs, une licorne... Cocteau sur un cheval de bois, dans le jardin, l’ombre de sa cigarette sur un mur, le beau visage de la propriétaire des lieux, madame Weisweiller.

Ode à la Méditerranée, charme suranné, ringardise magnifique, maladresse revendiquée.

Un beau voyage dans un rêve animé en Technicolor. Laissons le dernier mot au poète, dans ce coin de France qu’il appréciait tant:

« Je sors peu, hélas, et laisse ce soin au double de légende qu'on m'invente et qui circule à ma place. C'est pourquoi je ne vous parle pas des fêtes et des plaisirs nocturnes que cette ombre chinoise connaît certes mieux que moi. Je ne vous parle que d'une rive où les effluves mythologiques de la Méditerranée produisent un admirable mélange de paresse et de travail ».

 

 

Publié dans somewhere'land

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
A
<br /> http://www.villasantosospir.fr/<br />
Répondre
A
<br /> la visiter...<br /> <br /> <br /> http://www.le-sud-jean-cocteau.org/route_jean_cocteau/villa_santo_sospir.html<br />
Répondre
A
<br /> <br /> un extrait : http://www.dailymotion.com/video/x4rkei_jean-cocteau-villa-santo-sospir-ext_shortfilms<br /> <br /> <br /> <br />
Répondre
A
<br /> <br /> Riviera an 1, dans Libé cette fois:<br /> <br /> <br /> http://www.liberation.fr/societe/0101644842-riviera-an-1<br /> <br /> <br /> <br />
Répondre
A
... à lire à propos de l'actuelle Villefranche-sur-Mer :http://www.lemonde.fr/voyages/article/2008/10/31/panorama-de-villefranche-sur-mer_1113271_3546.html#xtor=RSS-3546
Répondre