Ailleurs, ici et maintenant avec Aubert
Jean-Louis, il y a bien longtemps, c’était pour beaucoup une « gueule ». Visage au scalpel, bouche et cheveux façon Jagger. Comme un clone du Mick, beuglant sa rage en français. Inédit, ou presque à l’époque, le rock en français. Son pote Louis, lui c’était la version « Keith » du guitariste made in France, forcément. Des années après l’aventure Téléphone, difficile pourtant de voir encore des liens entre les aînés et leurs petits neveux frenchies.
Jeudi soir, ce n’est pas une gueule mais un sourire qu’on a retrouvé, au Cirque royal, pour le « Tour sur moi-même » de Mister Aubert. L’homme arrive, rayonnant, tout en noir et pieds nus. Seul sur scène, mais entouré de quelques guitares, d’un piano qui a l’air d’avoir rétréci au lavage, de quelques percus, dont un gong qui ressemble au couvercle d’un barbecue, et d’une palette de pédales destinées à faire se mêler les sons, à lancer des loops, à créer les effets. Dernier petit joujou en date, une pédale californienne – « 350 pages de mode d’emploi quand même », précise notre chanteur. Et pas loin, dans la salle, la table de mixage où l’on devine une activité certaine durant les deux heures et plus du spectacle offert.
Le « Tour sur moi-même – Aubert en acoustique », c’est comme un trip offert, celui d’un garçon qui reprend la route, qui revient à ses débuts – Ibiza, quelques potes (dont Olive) qui grillent des pétards à poil dans une grotte en se faisant des plans : « et pourquoi pas faire un groupe de rock en français ? » – et qui vous emmène jusqu’à l’instant présent et partagé, là dans cette salle, après quelques haltes dans des contrées qui ne vous sont pas inconnues. Comme une démonstration de temps circulaire. Une plongée dans le temps, remplie de notes, d’accords et de mots, d’anecdotes, drôles souvent amères parfois, qui éclairent d’un jour nouveau les écrits : « Mes albums sont mes points d'ancrage... Ça ressemble à un journal… il y a ce qui est conscient et ce qui est caché, là en dessous... Des idées, des émotions, j'en chope tout le temps… Il y a une attitude d'esprit inspiration et une attitude expiration…»
De « Metro, c’est trop » à « Ailleurs », Jean-Louis Aubert a offert un concert généreux, intelligent et souriant. De quoi vous donner envie, au sortir du concert, de gueuler à tue-tête devant les caméras de sécurité de la rue de la Loi, les mots empruntés à Barbara :
« Suivons les rivières,
gardons les torrents
Restons en colère, soyons vigilants
Même si tout semble fini
N'oublions jamais qu'au bout d'une nuit
Qu'au bout de la nuit, qu'au bout de la nuit
Doucement, l'aube revient quand même !!! »
ps : pour goûter au concert de jeudi, petit extrait trouvé sur youtube : temps à nouveau